Soudan du Sud: la crise s'envenime entre les deux hommes forts du pays, craintes d'un nouveau conflit

Le 11 septembre, le numéro deux de l'exécutif sud-soudanais, Riek Machar, assigné à résidence, a été inculpé pour meurtre et "crimes contre l'humanité" par la justice sud-soudanaise. Il fait aujourd'hui planer une menace, celle d'un nouveau conflit dans le pays après une guerre civile qui a déjà fait au moins 400.000 morts.

Sep 18, 2025 - 16:15
Soudan du Sud: la crise s'envenime entre les deux hommes forts du pays, craintes d'un nouveau conflit
Au Soudan du Sud, tout un pays retient son souffle, alors que la situation entre les deux hommes forts du pays s'envenime. TV5MONDE

En quelques mois, la situation est devenue suffisamment inflammable pour pouvoir exploser à tout instant. Et chaque développement semble rapprocher inlassablement le Sud-Soudan, le plus jeune pays du monde, vers un nouveau conflit.

Le point de départ de l'enchaînement des violences commence à Nasir. C'est là que le 3 mars, environ 6.000 combattants de la milice de l'"Armée blanche", envahissent un campement militaire et tuent par la même un général de haut rang, selon le ministère de la Justice.

Échec de l'accord de partage du pouvoir

La milice de l'"Armée blanche" se compose de jeunes issus de la communauté ethnique Nuer, dont est issu Riek Machar, le vice-président sud-soudanais. Les alliés de Salva Kiir, président du Sud Soudan depuis 2011 faute d'élections, accusent les forces de Riek Machar, d'avoir entretenu des troubles en collaboration avec l'Armée blanche.

Fin mars, Riek Machar est arrêté. Il est assigné à résidence. Depuis, c'est l'escalade. En avril, des affrontements éclatent autour de la ville de Nasir. Ils participent à l'échec de l'accord de partage du pouvoir entre le président Salva Kiir et le vice-président Riek Machar. C'est cet accord de paix qui avait mis un terme au bain de sang de la guerre civile débutée en 2013, terminée en 2018.

Le 11 septembre, Riek Machar est déchu de son poste de vice-président. Il est aussi inculpé pour "crimes contre l'humanité". Il lui est reproché d'avoir participé à la coordination de l'attaque contre la base militaire de Nasir, en collaboration avec l'"Armée blanche", selon le ministère de la Justice. Les soutiens de Riek Machar nient cette version des événements.

Ils sortent un communiqué, affirmant que le régime de Salva Kiir est "une dictature en devenir, (qui) sabote la paix (...) et détient le pouvoir illégalement et par la violence". Ils lancent aussi un appel à ce que "tous (les) partisans, membres des ailes politique et militaire, les citoyens se présentent pour le service national afin de défendre les citoyens et le pays, et à utiliser tous les moyens disponibles pour reprendre le pays et sa souveraineté".

"Cette inculpation, c'est la touche finale de Salva Kiir et de ses alliés, de la lente marginalisation de Riek Machar, qui a commencé dès le lendemain de la signature de l'accord de paix signé en 2018", explique à TV5MONDE François Sennesael, spécialiste du Soudan du Sud et doctorant en science politique à l'université d'Oxford au Royaume-Uni.

900 personnes sont mortes entre janvier et mi-avril

D'autres tensions agitent le pays: frappes dans le nord-est, tirs d'artillerie près de la capitale et récemment, des combats isolés dans le sud. 900 personnes sont mortes entre janvier et mi-avril du fait des soubresauts politiques, selon l'ONU.

"Elle n'est pas dite, elle n'est pas affichée, cette forme de guerre un peu sous-jacente, mais elle est vraiment réelle et bien présente", raconte au micro d'Africa Radio Emmanuelle Veuillet, post-doctorante à l'EHESS et à l'IMAF.

En plus de l'instabilité politique et sécuritaire, la population sud-soudanaise est aussi la victime d'un pillage à grande échelle, affirme dans un rapport l'ONU. L'organisation décrit "une pauvreté généralisée et l’absence d’infrastructures et de services de base, conséquences directes de la corruption"

Le Sud Soudan est l'un des pays les plus pauvres du monde, pourtant les recettes pétrolière réalisées depuis 2011 atteignent "à elles seules 25,2 milliards de dollars", "une somme colossale".

[Source: TV5Monde]