Entre responsabilité historique et exigences de l'ère moderne : vers un Conseil des représentants irakien efficace

Dr. Sirwan Abdulkarim Ali

Nov 13, 2025 - 15:51
Entre responsabilité historique et exigences de l'ère moderne : vers un Conseil des représentants irakien efficace
Chambre des représentants irakienne.

Il convient de féliciter le peuple irakien pour le succès des récentes élections au Conseil des représentants. Elles se sont déroulées dans un climat de calme et de transparence, et leurs résultats ont été acceptés tant au niveau national qu'international. Il convient également de remercier la Haute Commission électorale indépendante, qui a donné un exemple louable de professionnalisme et d'intégrité. Les résultats obtenus par la Commission ont démontré que le système électoral irakien est capable d'évoluer et de répondre aux normes démocratiques, d'autant plus que ces élections se sont déroulées sans incident majeur ni fraude et constituent une réussite remarquable par rapport aux cycles précédents. Ce succès ne marque pas la fin du chemin, mais plutôt une avancée significative dans la construction d'un État démocratique fondé sur la transparence et la responsabilité.

Toutefois, cette réussite confère une responsabilité accrue au sixième Conseil des représentants iraquien, qui se trouve aujourd'hui à un tournant décisif, entre le rétablissement de la confiance du public et sa perte définitive. La responsabilité parlementaire ne se limite plus aujourd'hui aux cadres traditionnels de la chambre législative. Elle s'est étendue au domaine de la surveillance numérique en temps réel, exercée par les médias et les plateformes sociales qui sont devenus des arènes publiques de contrôle et, parfois, des tribunaux de l'opinion publique.

Compte tenu de statistiques alarmantes telles que l'absence persistante de plus de 150 membres et le « silence législatif » de plus de 160 membres lors de la législature précédente, il n'est plus acceptable que les performances parlementaires restent opaques. Ces réalités exigent une réforme structurelle globale capable de restaurer à la fois l'autorité et la crédibilité de l'institution législative irakienne.

Les membres doivent comprendre qu'ils sont soumis à une double responsabilité : celle de l'histoire et celle de leurs contemporains. Chaque vote, chaque absence et chaque déclaration publique est désormais enregistrée de manière permanente dans les archives numériques de la mémoire publique. Étant donné que le coût financier de chaque membre du Parlement est estimé à près d'un million de dollars par mandat, tout manquement à ses obligations constitue un gaspillage direct des fonds publics, des fonds qui appartiennent au peuple et non à une élite privilégiée.

La négligence persistante, l'absentéisme ou l'absence de contribution législative doivent être considérés comme un manquement grave à leurs obligations et faire l'objet de mesures disciplinaires fermes. Par conséquent, le Conseil doit adopter un système d'évaluation transparent, publié régulièrement sur son site web officiel et indiquant le taux de participation, le taux de présence et l'engagement de chaque membre dans ses fonctions législatives et de contrôle. La confiance du public ne sera pas regagnée par des discours ou des slogans, mais par une responsabilité documentée et des réformes visibles.

Réformer les performances parlementaires ne consiste pas seulement à faire respecter la discipline, mais aussi à créer un environnement de travail stable et favorable qui permette aux députés d'être efficaces. Un député n'est pas simplement un orateur ou un électeur, mais un élément essentiel d'un système institutionnel complexe qui dépend d'un soutien administratif, technique et de recherche constant.

L'administration parlementaire irakienne souffre actuellement de fréquents changements politiques qui affectent le personnel et les commissions, affaiblissant les performances et érodant la mémoire institutionnelle. Pour surmonter ce défi, l'administration du Conseil des représentants doit devenir stable, professionnelle et isolée des changements politiques, avec des employés permanents et non partisans qui se consacrent à assurer la continuité du travail législatif.

Au-delà de la stabilité interne, l'avenir d'un parlement efficace réside dans une collaboration stratégique avec les universités et les centres de recherche nationaux. L'établissement de partenariats avec des institutions universitaires peut fournir aux commissions du Conseil des études spécialisées, des analyses politiques et une expertise technique dans des domaines clés tels que l'économie, le droit, l'administration, l'environnement et le développement social.

Chaque commission parlementaire devrait donc être soutenue par un bureau de recherche permanent lié aux universités et aux institutions de recherche. Ces bureaux aideraient à analyser les projets de loi, à évaluer leurs implications constitutionnelles, économiques et sociales, et à préparer des notes d'orientation détaillées. Cette collaboration permettrait de garantir que les députés fondent leurs décisions sur des données fiables et une bonne compréhension de la situation, plutôt que sur leur instinct politique ou l'improvisation.

De tels partenariats transformeraient le Parlement irakien, qui passerait d'une arène politique réactive à une institution fondée sur la connaissance, légiférant avec prévoyance, exerçant un contrôle avec professionnalisme et rétablissant la confiance du public grâce à une prise de décision fondée sur des preuves.

Le travail parlementaire est fondamentalement une entreprise technique et professionnelle qui exige une formation continue. De nombreux députés entrent au Conseil sans avoir une expérience suffisante des fonctions législatives ou de contrôle, ce qui limite leur efficacité malgré leurs bonnes intentions. C'est pourquoi l'Irak doit de toute urgence créer un institut de formation parlementaire spécialisé afin de préparer et de soutenir les députés dès le début de leur mandat.

Cet institut devrait se concentrer sur trois domaines essentiels :

1. Formation aux outils de contrôle : doter les députés des compétences nécessaires pour utiliser efficacement les mécanismes clés, tels que les questions parlementaires, les interpellations et les commissions d'enquête.

2. Analyse législative : enseigner aux députés comment examiner les projets de loi d'un point de vue constitutionnel, économique et social, en partenariat avec les universités et les organismes de recherche.

3. Connaissance du budget : former les députés à lire et à évaluer les budgets nationaux et sectoriels afin de renforcer le contrôle financier et de lutter contre la corruption.

Un tel institut n'est pas un luxe, mais une nécessité nationale pour garantir que chaque député dispose des connaissances et des outils nécessaires à un travail législatif et de contrôle moderne.

L'optimisme concernant la sixième législature doit être mesuré et subordonné à une véritable réforme institutionnelle. Une véritable réforme ne s'obtient pas par des déclarations de félicitations ou des promesses, mais par un système interne rigoureux qui impose la responsabilité et la transparence, soutient les députés grâce à une structure administrative et de recherche stable, et met en place un institut de formation professionnelle afin de renforcer les compétences en matière de contrôle et de législation.

Le Conseil des représentants iraquien est aujourd'hui confronté à une occasion historique de redéfinir la relation entre le parlement et le peuple, entre la législation et la responsabilité, et entre la responsabilité et les privilèges. S'il adopte cette vision de la réforme fondée sur la stabilité, la connaissance et la transparence, le parlement pourra redevenir un producteur plutôt qu'un consommateur de confiance, capable de répondre aux exigences de l'ère moderne avec professionnalisme et intégrité, tout en incarnant véritablement les aspirations du peuple iraquien à un État juste, démocratique et tourné vers l'avenir.

[Traduit pas EDGE news]