Gaza : le gouvernement Nétanyahou approuve la première étape du plan de paix malgré ses divisions
L’extrême droite rejette l’accord, qui prévoit la libération de 2 000 prisonniers palestiniens, mais ne souhaite pas, à ce stade, quitter la coalition.

Israël a formellement adopté, jeudi 9 octobre au soir, l’accord entérinant la fin de la guerre à Gaza, première étape du plan de paix promu par le président américain, Donald Trump. Le gouvernement a validé à une large majorité les conditions posées par les négociateurs à Charm El-Cheikh, en Egypte, dans la nuit de mercredi à jeudi, pour obtenir à la fois le cessez-le-feu, le retrait partiel de l’armée israélienne de la bande de Gaza, la libération des 48 otages en échange de près de 2 000 prisonniers palestiniens et l’entrée immédiate d’une aide humanitaire accrue. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a été rejoint, pour la fin de la réunion de son gouvernement, par les émissaires américains, Steve Witkoff et Jared Kushner.
Les bombardements de l’armée israélienne, qui se sont poursuivis jusqu’à la dernière minute, provoquant des victimes dans un bâtiment dans la ville de Gaza, jeudi soir, sont supposés s’arrêter. Le retrait partiel de l’armée – qui demeurerait temporairement sur un peu plus de 50 % de la bande de Gaza – est censé intervenir dans les vingt-quatre heures suivant cette validation de l’accord.
Les libérations de la vingtaine d’otages toujours vivants et des prisonniers palestiniens pourraient, dès lors, avoir lieu lundi 13 octobre, selon Donald Trump, avant l’expiration d’un deuxième délai de soixante-douze heures, commencé dès la fin de ce premier retrait des forces israéliennes. Le retour d’une partie des dépouilles des otages décédés pourrait prendre un peu plus de temps.
Une coalition fragile
Au-delà du soulagement immédiat pour les otages et pour la population gazaouie, l’arrêt immédiat des combats ne constitue qu’une première étape. « Sur les 20 points du plan Trump, ce qui a été obtenu hier ne représente que 4 points et demi ! Le reste est bien plus compliqué et plus vous avancez dans le plan, plus cela est vague, plus cela peut être interprété différemment par les deux parties », a signalé, jeudi, Amos Yadlin, ancien directeur du renseignement militaire, lors d’une conférence avec des journalistes.
Même prudence pour Tamir Hayman, directeur de l’Institute for National Security Studies (INSS), un groupe de réflexion israélien, pourtant convaincu que « l’accord signé est très bon, bien meilleur que prévu ». « Ce qui importe désormais, c’est de mettre en œuvre la phase B de l’accord, à savoir garantir le désarmement du Hamas et son éviction du pouvoir à Gaza, souligne-t-il. Si cette étape n’est pas franchie, nous nous retrouverons une fois de plus face à une bande de Gaza contrôlée par le Hamas, et le problème restera entier. »
Sur un plan strictement politique, le destin de la coalition au pouvoir en Israël depuis fin 2022 demeure fragile. La libération des otages constitue l’aspect le plus consensuel du plan de paix défendu par Donald Trump, à la différence des conditions du désarmement du Hamas et de la future gouvernance de la bande de Gaza, une fois l’autorité du Hamas démantelée.
Aux yeux des principaux représentants de l’extrême droite au sein du gouvernement, Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich, la guerre devait, de surcroît, permettre d’envisager l’installation de nouvelles colonies dans l’enclave, l’expulsion forcée de Palestiniens et l’annexion de la Cisjordanie. Le plan Trump ne valide aucune de ces demandes.
Répit temporaire
L’extrême droite a laissé entendre publiquement ses critiques et son refus d’endosser cette première étape en raison de la libération de prisonniers palestiniens. Même si l’Etat hébreu s’est formellement opposé à la remise en liberté d’une figure comme Marwan Barghouti, membre du Fatah condamné à vie en 2004, il a dû accepter la libération de 250 autres prisonniers condamnés à perpétuité.
« Ce sont des terroristes dont l’expérience passée montre qu’ils reviendront à des activités terroristes et qu’ils restent capables d’agir pour assassiner des juifs », a affirmé Itamar Ben Gvir, ministre de la sécurité nationale, pour justifier son refus de voter en faveur de l’accord. Mais le dirigeant du parti d’extrême droite Force juive ne franchit pas le pas de la démission. Tout au plus, il fixe une ligne rouge assez vague pour l’avenir : « Si le régime du Hamas n’est pas démantelé ou si l’on se contente de nous dire qu’il est démantelé alors qu’il continue d’exister sous une autre forme, alors Force juive démantèlera le gouvernement. »
Le premier ministre sait que la libération des otages lui offre un répit temporaire, à l’image du soutien dont il avait disposé lors de la « guerre de douze jours » contre l’Iran, en juin. Ce que Donald Trump a résumé à sa façon à la Maison Blanche : « Je pense que [M. Nétanyahou] est très populaire en ce moment. Il est beaucoup plus populaire aujourd’hui qu’il ne l’était il y a cinq jours. » Salué de toutes parts, majorité et opposition confondues, le président américain est invité à prononcer un discours devant la Knesset, dimanche, à l’issue d’un probable déplacement éclair en Egypte et en Israël.
[Source: Le Monde]