Toulouse - Bordeaux-Bègles : le Stade toulousain reste roi de France, au « caractère » et au savoir-faire

Les Rouge et Noir, emmenés par un Thomas Ramos des grands soirs, ont remporté le championnat de France de rugby, samedi 28 juin, au Stade de France, en venant à bout de l’Union Bordeaux-Bègles (39-33) au terme de la prolongation.

Juin 29, 2025 - 09:32
Toulouse - Bordeaux-Bègles : le Stade toulousain reste roi de France, au « caractère » et au savoir-faire
Les joueurs du Stade toulousain célèbrent leur victoire contre l’Union Bordeaux-Bègles lors de la finale du championnat de Top 14, au stade de France, à Saint-Denis, le 28 juin 2025. MARTIN BUREAU / AFP

Il ne pouvait en être autrement. L’épilogue du championnat de France de rugby entre le Stade toulousain et l’Union Bordeaux-Bègles (UBB), les deux meilleures équipes de la saison régulière, ne pouvait basculer qu’au terme d’une folle dramaturgie et un combat furieux de corps essorés par la moiteur du Stade de France. Samedi 28 juin, ce sont les Toulousains, champions en titre, qui se sont relevés vainqueurs de la finale du Top 14 (39-33), après prolongation et plus de deux heures trente de jeu. Il faut remonter vingt ans en arrière pour retrouver trace d’une finale de Top 14 conclue après la fin du temps réglementaire – Biarritz s’était imposé (37-34) en 2005 face au Stade français.

« On a fait preuve d’un état d’esprit qu’on a rarement eu cette saison. Ce soir, je crois que le Stade toulousain ne doute pas », a réagi l’arrière Thomas Ramos, auteur d’un sans-faute au pied et désigné homme du match. « Il nous semblait que beaucoup de choses nous échappaient mais il y a un truc qui ne nous a pas échappé ce soir, c’est le caractère », s’est réjoui de son côté Ugo Mola, l’entraîneur du Stade.

La victoire des Rouge et Noir est aussi celle de l’expérience voire du savoir faire d’une équipe qui ne sait pas perdre dans les matchs à enjeu, ou si peu. Samedi, les Stadistes ont ajouté un 24e Bouclier de Brennus à leur armoire à trophées, le troisième d’affilée, le cinquième depuis 2019. Ils s’affirment un peu plus encore comme le centre de gravité de l’ovalie, dépositaires d’un jeu, dit à la toulousaine, enseigné dans toutes les écoles de rugby.

La désillusion est en revanche cruelle pour l’Union Bordeaux-Bègles. Récents vainqueurs de la Champions Cup, les hommes de Yannick Bru ne réaliseront pas le doublé Coupe d’Europe-Top 14 qui aurait fait rentrer ses joueurs « dans la cour des grands », selon le vœu de Laurent Marti, le président du club.

Les Bordelo-Béglais n’ont pas non plus lavé l’humiliation du Stade Vélodrome quand, il y a un an jour pour jour, ils avaient été corrigés par ces mêmes Toulousains (59-3) pour la première finale de Top 14 de l’histoire du club – l’UBB est née de la fusion en 2006 du Stade Bordelais et du CA Bordeaux-Bègles Gironde, deux clubs emblématiques du rugby français.

Pendant la semaine, les Unionistes ont refusé de parler de revanche. « Parce que ça engendre des émotions qui peuvent prendre le pas sur la performance », expliquait le demi de mêlée international Maxime Lucu, vendredi, en conférence de presse. Avant d’ajouter : « On prépare ça [ce match] juste en se disant qu’on a réussi à revenir et que maintenant, il faut savoir si on a appris, si on a grandi. »

Les Girondins ont appris, ils ont grandi aussi. Ils pensaient même avoir trouvé les clefs cette saison pour enrayer la mécanique de précision toulousaine, parfaitement huilée autour d’un pack destructeur et de trois quarts au jeu instinctif. Ils avaient maté les hommes d’Ugo Mola chez eux au stade Ernest-Wallon au début de l’automne. Et surtout, ils avaient, en demi-finale de Champions Cup, début mai, déboulonné les stadistes de leur piédestal européen, semant quelques doutes dans les têtes toulousaines.

Toulouse remporte sa onzième finale d’affilée

Les Haut-Garonnais ont fait le dos rond, terminant la phase régulière sans convaincre. Leur demi-finale de Top 14 contre de valeureux Bayonnais n’a pas non plus suffi à lever toutes les incertitudes. Mais, comme avait mis en garde Yannick Bru, l’entraîneur de Bordeaux, avant la rencontre, « il y a un Toulouse de la saison régulière et un Toulouse qui se présente en finale ».

Et samedi, l’adage de l’ancien toulousain s’est vérifié. Le Stade ne sait décidément pas perdre, capable de se retrouver, de se transcender même quand il le faut. La force de l’habitude. Les Haut-Garonnais ont remporté dans l’enceinte dyonisienne leur onzième finale d’affilée toutes compétitions confondues – leur dernier revers remonte à 2006.

Ils y sont parvenus, en l’absence de leur maître à jouer Antoine Dupont, gravement blessé début mars en Irlande. Beaucoup en doutaient. Mais les Rouge et Noir, peu épargnés par les blessures au printemps – Ange Capuozzo, Peato Mauvaka, etc. – ont pu s’appuyer sur leurs fidèles grognards que sont les avants Julien Marchand, Anthony Jelonch – éblouissant samedi – ou encore le troisième ligne anglais Jack Willis – auteur d’un doublé –, tous trois exemplaires dans la détermination et le combat.

La finale du Top 14 était « l’affiche rêvée, celle que tout le public attendait, notre Alcaraz-Sinner à nous », disait au Monde la veille du match Yann Roubert, le président de la Ligue nationale de rugby. Il n’avait pas tort. Elle a mis aux prises les deux meilleures attaques de la saison régulière. S’il a fallu trente minutes pour qu’elle se décante avec l’essai d’Anthony Jelonch, le spectacle promis a ensuite été au rendez-vous, avec six essais à la clef (trois de chaque côté). Le suspense a culminé quand Maxime Lucu, lui aussi irréprochable face aux perches, a passé la pénalité de l’espoir à la dernière minute du temps réglementaire, envoyant les deux équipes en prolongation.

Vingt minutes supplémentaires au cours desquelles les hommes d’Ugo Mola ont étalé leur maîtrise, leur expertise des moments couperets. La diabolique précision de Thomas Ramos s’est chargée de le rappeler. Depuis deux ans, Bordelo-Béglais et Toulousains donnent à voir un nouvel épisode d’une rivalité dont le rugby a le secret. Au regard de l’intensité et du scénario de la finale de samedi, à ranger au panthéon du Top 14, tout porte à croire qu’elle ne fait que commencer.

[Source: Le Monde]