Reconnaissance de l’Etat palestinien : le Royaume-Uni se place dans le sillage de la France

Mardi 29 juillet, le premier ministre britannique, Keir Starmer, a annoncé que le Royaume-Uni reconnaîtrait l’Etat de Palestine lors de la prochaine Assemblée générale de l’ONU, en septembre. D’autres Etats comme le Canada, l’Australie et le Portugal pourraient suivre. Une « dynamique » dont Paris se félicite.

Juil 31, 2025 - 08:55
Reconnaissance de l’Etat palestinien : le Royaume-Uni se place dans le sillage de la France
Le premier ministre britannique, Keir Starmer, au 10 Downing Street, à Londres, le 29 juillet 2025. TOBY MELVILLE / REUTERS

Le ministre des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, était à la tribune de l’ONU, mardi 29 juillet, occupé à ressusciter la solution à deux Etats pour esquisser la voie d’une paix entre Israël et la Palestine. Au même moment, le premier ministre britannique, Keir Starmer, s’engageait, depuis l’Ecosse, à quelques réserves près, à reconnaître, lors de la prochaine Assemblée générale de l’ONU, en septembre, l’Etat de Palestine.

Par ce geste, Keir Starmer se place dans le sillage d’Emmanuel Macron, qui avait fait la même promesse cinq jours plus tôt. Le locataire du 10 Downing Street a certes précisé, dans sa déclaration, qu’il pourrait se raviser si le gouvernement israélien prenait « des, mesures substantielles pour mettre fin à la situation épouvantable à Gaza », convenait « d’un cessez-le-feu » et s’engageait « dans une paix durable et à long terme, ravivant la perspective d’une solution à deux Etats ».

Mais la perspective que la coalition d’extrême droite au pouvoir en Israël consente à un tel revirement paraît peu probable. Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a d’ailleurs vivement réagi, estimant que « Starmer récompense le terrorisme monstrueux du Hamas et punit ses victimes », des formules déjà utilisées à l’endroit d’Emmanuel Macron.

« On n’a plus le choix »

Dans les couloirs du siège de l’ONU, où il a coprésidé, avec son homologue saoudien, Fayçal Ben Farhan Al Saoud, une conférence sur la solution à deux Etats, les 28 et 29 juillet, le ministre des affaires étrangères français, Jean Noël Barrot, s’est félicité auprès du Monde, du « relief historique » de l’initiative de l’Elysée. Grâce au ralliement du Royaume-Uni, Emmanuel Macron n’est plus isolé. La « dynamique » espérée par l’Elysée se concrétise. Dans la soirée l’« appel de New York » lancé par une quinzaine de ministres des affaires étrangères a confirmé que d’autres Etats comme le Canada, l’Australie et le Portugal, avaient « la volonté ou la considération positive » de reconnaître, eux aussi, la Palestine. « On ne suit pas l’horaire de M. Macron, mais on n’a plus le choix », souligne une source diplomatique canadienne.

« Nous avons créé, en quelque sorte, un mouvement de plaques tectoniques », estime M. Barrot. La déclaration finale de la conférence, endossée par tous les participants dont plusieurs Etats influents du Proche-Orient (Qatar, Egypte et Turquie en plus de l’Arabie saoudite), appelle aussi au désarmement du Hamas, une exigence chère au président français. Le mouvement islamiste à l’origine de l’attaque terroriste du 7 octobre 2023 « doit mettre fin à son contrôle de Gaza et remettre ses armes à l’Autorité palestinienne », souligne le texte.

Peu importe qu’Israël et les Etats-Unis aient snobé la conférence. Le « reste du monde » était là, avance Zeid Ra’ad Al Hussein, président de l’Institut international pour la paix, à New York. S’il vante le « charme français », l’ancien haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme reconnaît que ce n’est la seule explication du succès de la conférence. La situation à Gaza où sévit une famine orchestrée par le gouvernement israélien, cumulée à la colonisation à marche forcée de la Cisjordanie, suscite l’indignation dans le monde entier. L’attitude du gouvernement de Benyamin Nétanyahou est « un affront fait à la Charte des Nations unies », s’est ému David Lammy, secrétaire d’Etat britannique aux affaires étrangères, depuis la tribune de l’ONU.

Mais l’un des intervenants l’a fait remarquer : pendant que les pays se scandalisent, les Gazaouis continuent d’être tués. Mardi 29 juillet, 43 d’entre eux, des femmes et des enfants pour la plupart, ont péri lors de bombardements israéliens, selon la défense civile de l’enclave. Les agences onusiennes ont appelé à « inonder » d’aide alimentaire le territoire, menacé de « famine généralisée ». Jean-Noël Barrot a annoncé dans la foulée que la France larguerait, à partir de vendredi, 40 tonnes d’aide sur l’enclave.

Mais ce soutien, équivalent au contenu de trois camions, n’est qu’une goutte d’eau. Et si Paris a dénoncé, mardi, le meurtre par un colon israélien d’Odeh Hathalin, figure de la résistance palestinienne pacifique dans le sud de la Cisjordanie, en assimilant les exactions répétées des extrémistes juifs à des « actes de terrorisme », la France répugne toujours à franchir le pas des sanctions. « Nous n’avons pas de tabous », se défend M. Barrot. Le chef du Quai d’Orsay juge que seules des sanctions prises au niveau européen seraient efficaces et avoue être frustré que l’Union peine, pour l’instant, à trouver l’unanimité nécessaire pour agir.

[Source: Le Monde]