Maladie de Parkinson : le vélo, outil précieux pour réduire les symptômes

Oct 3, 2025 - 17:26
Maladie de Parkinson : le vélo, outil précieux pour réduire les symptômes
Un homme de 58 ans, atteint de la maladie de Parkinson, présente un blocage de la marche invalidant (photo A). La capacité du patient à faire du vélo est préservée (photo B). ANKE H. SNIJDERS, M.D., AND BASTIAAN R. BLOEM, M.D.

Sur la première partie de la vidéo, l’homme, agité de forts tremblements des membres supérieurs, se met difficilement en marche dans un couloir d’hôpital. Puis il se fige, repart à petits pas plus rapides, avant de perdre l’équilibre. Dans la deuxième partie de ce film de moins de deux minutes, tournée en extérieur, ce même patient pédale avec aisance sur un vélo sur plusieurs centaines de mètres avant de revenir à son point de départ.

En accès libre sur YouTube, cette vidéo spectaculaire a en fait été publiée dans un journal médical, The New England Journal of Medicine, en 2010, par deux médecins néerlandais. Elle accompagne leur courte présentation d’un cas de maladie de Parkinson chez un homme de 58 ans dont le freezing – épisodes de blocage des mouvements et notamment de la marche – disparaissait totalement à bicyclette.

La curiosité des spécialistes de cette pathologie neurodégénérative (qui touche quelque 200 000 personnes en France, 12 millions dans le monde) pour les bienfaits du pédalage est née aux Etats-Unis, en 2003. Alors qu’il participe à une randonnée cycliste de sept jours en tandem avec une amie parkinsonienne, le neurologue et chercheur Jay Alberts constate au bout de quelques jours que les troubles de l’écriture de sa coéquipière ont nettement régressé. Intrigué, il a depuis mené des recherches et publié, en 2022, un petit essai randomisé montrant que 24 séances sur huit semaines d’ergocycle (vélo stationnaire), à intensité modérée à élevée, améliorent sensiblement la vitesse et la biomécanique de la marche de patients. Le médecin de la Cleveland Clinic, selon qui une pratique régulière peut réduire jusqu’à 35 % les symptômes de la maladie de Parkinson et ralentir son évolution, a développé un programme, « Pedaling for Parkinson’s ».

D’autres publications vont dans le même sens. Une méta-analyse de chercheurs européens, publiée en 2021, à partir de 22 études et de 505 patients, a, elle, retrouvé une amélioration significative de la motricité chez les cyclistes, ainsi que des progrès dans l’équilibre, la vitesse de marche, et de meilleurs scores à un questionnaire de qualité de vie (PDQ-39). Pédaler agit sur les neurones des noyaux gris centraux, avec des effets immédiats négligeables, mais significatifs à long terme, selon une étude américaine datant de juin, menée chez des malades parkinsoniens dont l’activité électrique neuronale a pu être mesurée avant et après des séances d’ergocycle, grâce à des électrodes de stimulation cérébrale profonde.

« Un médicament comme les autres »

La petite reine serait-elle l’activité de choix pour ces patients ? Ceux qui l’apprécient peuvent en tout cas la pratiquer même en cas de troubles de l’équilibre, avec des ergocycles ou des vélos de route adaptés, tricycles par exemple. Marche, danse, tennis de table… De nombreuses autres façons de bouger ont démontré leurs bienfaits dans la maladie de Parkinson.

« L’activité physique est un médicament comme les autres, l’important est de trouver quelque chose qui plaît et de l’inscrire dans sa routine », plaide la docteure Maud Elbel (médecine physique et réadaptation, à l’institut universitaire de réadaptation Clemenceau de Strasbourg). En se fondant sur les données de la littérature, la spécialiste propose, depuis 2018, des programmes intensifs de réentraînement à l’effort pour des patients avec un Parkinson pas trop handicapant. Pendant six semaines, en groupes de quatre-cinq, ils bénéficient de trois sessions hebdomadaires d’une demi-journée avec ergocycle, musculation, tennis de table, aquagym, marche nordique et yoga. Objectif : les faire bouger et leur remettre le pied à l’étrier. Les résultats (non publiés) sont positifs. « Tous les patients disent se sentir mieux à la fin du programme, et leur force musculaire est en général améliorée. Certains parviennent même à baisser leurs médicaments », détaille Maud Elbel. Un programme similaire est réalisé chez des personnes atteintes de sclérose en plaques.

Dans la maladie de Parkinson comme dans beaucoup d’autres, l’activité physique reste une thérapie sous-utilisée. Selon une enquête de l’association France Parkinson de 2024 sur plus de 3 300 patients, trop sont insuffisamment actifs : 17 % ne pratiquent pas d’activité physique (dont près de la moitié ont arrêté après l’annonce de la maladie), tandis que 30 % en font moins depuis qu’ils sont malades. Au total, près de la moitié des personnes interrogées ont un niveau d’activité inférieur au seuil recommandé par l’Organisation mondiale de la santé : soixante-quinze minutes d’activité intense par semaine, ou cent cinquante si l’intensité est modérée.

[Source: Le Monde]