Un sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump prévu le 15 août, en Alaska, pour préparer les concessions territoriales de l’Ukraine

Ce sera la première rencontre entre les deux dirigeants depuis le retour à la Maison Blanche du républicain. Le président américain a obtenu une victoire d’apparence non négligeable, avec la tenue de la réunion sur le territoire des Etats-Unis.

Août 9, 2025 - 17:34
Un sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump prévu le 15 août, en Alaska, pour préparer les concessions territoriales de l’Ukraine
Vladimir Poutine et Donald Trump, lors d’un sommet du G20, à Buenos Aires, le 30 novembre 2018. JUAN MABROMATA/AFP

Les négociations directes entre les Etats-Unis et la Russie esquissent une amputation territoriale de l’Ukraine, qui consoliderait les gains russes sur le terrain, même si Donald Trump utilise des termes pudiques. « Il y aura des échanges de territoires pour le bien des deux parties », a déclaré le président américain à la Maison Blanche, vendredi 8 août, avant d’annoncer la tenue d’une rencontre au sommet avec Vladimir Poutine en Alaska, le 15 août, pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine.

« La rencontre tant attendue entre moi-même, président des Etats-Unis d’Amérique, et le président russe, Vladimir Poutine, aura lieu vendredi prochain, le 15 août, dans le grand Etat d’Alaska. Plus de détails suivront », a écrit Donald Trump sur son réseau Truth Social, vendredi après-midi. L’annonce du sommet, confirmée par Moscou, intervient après que l’envoyé spécial du président américain, Steve Witkoff, s’est rendu, mercredi 6 août, à Moscou, pour une réunion d’environ trois heures avec M. Poutine.

Le président russe se serait dit prêt à un cessez-le-feu complet si l’Ukraine acceptait de retirer ses forces de toute la région orientale de Donetsk, selon les informations du Wall Street Journal (WSJ). La Russie contrôlerait alors les régions de Donetsk et de Louhansk, ainsi que la péninsule de Crimée, conquise en 2014. Selon le WSJ, le sort réservé aux régions de Kherson et de Zaporijia, que les troupes russes occupent partiellement, est moins clair. Les négociateurs américains débattaient pour savoir si Moscou, qui revendique aussi ces deux régions, compte geler la ligne de front ou s’en retirer, au moins partiellement – ce qui permettrait peut-être d’employer, comme le fait Donald Trump, le terme d’« échange ».

Kiev semble s’assouplir

Quoi qu’il arrive, Kiev subit une immense pression pour céder des territoires, même si le pays le refuse a priori, y compris pour la Crimée, transférée par le numéro un soviétique Nikita Khrouchtchev à l’Ukraine en 1954, puis réannexée par la Russie en 2014. Sa Constitution l’interdit. Au vu des massacres commis pendant la guerre, Kiev semble toutefois s’assouplir, même si jusque-là Volodymyr Zelensky a refusé d’aborder le sujet avant un cessez-le-feu total. Samedi, le président ukrainien a mis en garde contre toute « décision qui serait prise sans l’Ukraine », réaffirmant que ses compatriotes « n’abandonneront pas leur terre aux occupants ».

Second sujet, tout aussi décisif : les garanties de sécurité de la part de l’Europe, des Etats-Unis ou de l’OTAN, que pourrait obtenir l’Ukraine pour empêcher la Russie d’interrompre, puis de reprendre, une guerre visant à s’emparer du reste du pays. Ce sujet semble être le parent pauvre des discussions russo-américaines en cours.

Selon le New York Times, Donald Trump a fait savoir à ses homologues européens qu’une réunion avec Volodymyr Zelensky pourrait suivre sa rencontre avec Vladimir Poutine. L’annonce intervient toutefois alors que le président américain n’est pas parvenu à infléchir jusqu’à présent les positions de son homologue russe, ni à obtenir la fin des hostilités qu’il prétendait négocier en vingt-quatre heures avant son retour à la Maison Blanche. Depuis toujours, il veut croire que de telles négociations se scellent dans les rencontres au sommet entre leaders.

Peu après sa prise de fonctions, le 20 janvier, Donald Trump avait évoqué une réunion avec Vladimir Poutine en Arabie saoudite, mais celle-ci s’est transformée en rencontre entre le secrétaire d’Etat américain, Marco Rubio, et le ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, à Riyad, sous l’égide des Saoudiens et sans Kiev. La fin du mois de février avait été marquée par l’humiliation de M. Zelensky à la Maison Blanche ; Donald Trump voulait soutirer l’exploitation de terres rares à son homologue, lui expliquant qu’il n’avait pas « les cartes en main ».

Les Européens entre scepticisme et espoir

Après n’avoir rien obtenu, pendant des mois, de Vladimir Poutine, qui n’a fait que se réarmer et accentuer son offensive, Donald Trump avait fini par hausser le ton, notamment dans la foulée de bombardements de civils à Kiev, fin juillet. « Je trouve que c’est dégoûtant ce qu’ils font », avait-il déclaré, à propos de la Russie.

Ce sera la première rencontre entre les deux dirigeants depuis le retour à la Maison Blanche de Donald Trump. Le président américain a obtenu une victoire d’apparence non négligeable avec la tenue de la réunion sur le territoire des Etats-Unis, même s’il fut une propriété de la Russie tsariste jusqu’en 1867. La décision survient également alors qu’il avait menacé de faire entrer en vigueur des sanctions supplémentaires contre Moscou vendredi 8 août.

Les Européens, qui ne sont pas à la manœuvre, oscillent entre scepticisme et espoir. « Un gel du conflit – je ne veux pas dire la fin de la guerre, mais un gel du conflit – pourrait peut-être survenir plus tôt que prévu », a déclaré, vendredi, le premier ministre polonais, Donald Tusk.

A Washington, le think tank Institute for The Study of War est beaucoup plus pessimiste, estimant que le président russe veut aller au-delà de ces concessions territoriales et faire de l’Ukraine un Etat fantoche : « Poutine ne souhaite toujours pas mettre fin à sa guerre et tente d’obtenir des concessions bilatérales de la part des Etats-Unis, sans s’engager véritablement dans un processus de paix, écrit le groupe de réflexion. Poutine continue de croire que le temps joue en faveur de la Russie. »

[Source: Le Monde]