Xi Jinping, Vladimir Poutine et Kim Jong-un réunis à Pékin pour une parade militaire et diplomatique
Les trois dirigeants se sont affichés ensemble pour la première fois, mercredi, à l’occasion d’un défilé commémorant la fin de la seconde guerre mondiale. A distance, Donald Trump, non invité, les a accusés de « conspirer » contre les Etats-Unis.
La scène, attendue depuis plusieurs jours, est devenue réalité, mercredi 3 septembre, à Pékin : le président chinois, Xi Jinping, son homologue russe, Vladimir Poutine, et le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, réunis pour la première fois sur la même image, avant d’assister à un grand défilé militaire – en compagnie d’une vingtaine de dirigeants étrangers – commémorant la fin de la seconde guerre mondiale.
M. Xi a serré la main tour à tour à M. Poutine puis à M. Kim ainsi qu’aux autres invités à leur arrivée successive. Puis, échangeant des amabilités, les dirigeants se sont mis en marche sur le tapis rouge, M. Poutine à la droite de M. Xi et M. Kim à sa gauche, en tête du groupe, vers la place Tiananmen pour la parade, aux allures de démonstration de force militaire et diplomatique de la part d’un pays « inarrêtable », selon son chef.
Une image du trio a été capturée pendant quelques secondes seulement par la télévision d’Etat avant de passer à un autre plan. Les médias étrangers ont été tenus à distance. Le symbole se veut fort : les trois hommes sont réunis pour la célébration de la victoire sur les menées hégémoniques du Japon et de l’Allemagne nazie au moment où ils sont engagés dans une épreuve de force stratégique avec les Occidentaux, Etats-Unis en tête. Le président américain Donald Trump a répondu par le sarcasme tout en accusant Chine, Russie et Corée du Nord de « conspirer » contre les Etats-Unis.
Aucun dirigeant occidental de premier plan n’était dans l’assistance, où avait toutefois pris place le premier ministre slovaque, Robert Fico, un allié de M. Poutine au sein de l’Union européenne.
« La renaissance de la nation chinoise est inarrêtable »
Lors du défilé au pas cadencé, lancé par des salves de canon, des milliers de participants ont entonné des chants patriotiques sur l’immense place pavoisée de drapeaux rouges et survolée par des avions et des hélicoptères, tandis qu’étaient présentés les derniers équipements militaires de Pékin.
M. Xi, debout dans sa voiture à toit ouvrant, a passé les troupes en revue. « La renaissance de la nation chinoise est inarrêtable et la noble cause de la paix et du développement de l’humanité triomphera assurément », a-t-il proclamé dans un discours.
Dans une période de tensions géopolitiques et de guerre commerciale, il a mis en garde : « L’humanité fait de nouveau face à un choix entre la paix ou la guerre, entre le dialogue ou la confrontation ». M. Xi a appelé à prévenir la réédition de « tragédies historiques » comme celle qui a vu mourir des millions de Chinois face aux troupes japonaises il y a plus de 80 ans. Il s’est gardé de toute référence explicite aux Etats-Unis ou aux sujets de discorde comme Taïwan ou les droits de douane.
Puis Vladimir Poutine s’est entretenu avec son homologue nord-coréen, Kim Jong-un, a fait savoir le Kremlin. « J’aimerais vous remercier de la part du peuple russe, parce que nos pays ont participé ensemble à la lutte contre le nazisme, le fascisme et le militarisme », a déclaré M. Poutine, au début de cette rencontre, en remerciant les « unités spéciales » nord-coréennes d’avoir « participé à la libération de l’oblast de Koursk », qui fut le théâtre pendant quelques mois d’une incursion ukrainienne d’ampleur. « Au nom de tout le peuple russe, je tiens à vous remercier de cette participation à la lutte commune avec le néonazisme contemporain. »
Grand coup diplomatique
A plusieurs milliers de kilomètres de cette parade, le président américain, Donald Trump, a souhaité à Xi Jinping et au « merveilleux » peuple chinois de passer « une excellente journée de célébrations ». « Veuillez transmettre mes salutations les plus chaleureuses à Vladimir Poutine et Kim Jong-un pendant que vous conspirez contre les Etats-Unis d’Amérique », a-t-il ajouté dans son message à la tonalité sarcastique publié sur son réseau Truth Social.
Jamais depuis son accession au pouvoir fin 2011, Kim Jong-un, avare de sorties hors de son pays reclus et soumis à de lourdes sanctions internationales, ne s’est montré dans une telle réunion de dirigeants étrangers. C’est pour la Chine un grand coup diplomatique et le point d’orgue d’une séquence de quelques jours au cours de laquelle elle a également accueilli un sommet régional des dirigeants d’une vingtaine de pays eurasiatiques. Pékin a aussi acté un rapprochement avec le premier ministre indien, Narendra Modi, écrasé par les sanctions douanières décidées par Washington.
Trump « déçu par le président Poutine »
Donald Trump, qui a exprimé son souhait de rencontrer le dirigeant nord-coréen, a accueilli M. Poutine en Alaska le 15 août pour tenter de trouver une issue à la guerre en Ukraine. Mais le président russe n’a montré aucun signe de conciliation pendant son séjour en Chine où il a affiché son entente avec M. Xi. Au contraire, il a de nouveau imputé la guerre à l’Occident.
Donald Trump s’est dit, mardi, « très déçu par le président Poutine ». Mais il n’est « pas préoccupé du tout » par l’alliance sino-russe. « Nous avons les forces militaires les plus puissantes au monde, de loin, et ils n’utiliseraient jamais les leurs contre nous. Croyez-moi, ce serait la pire chose qu’ils puissent jamais faire », a-t-il affirmé.
Quant à la Corée du Nord, les trois rencontres historiques de M. Kim avec M. Trump en 2018 et 2019 au cours du premier mandat de ce dernier pour enrayer la menace nucléaire et balistique que fait peser Pyongyang sur les alliés régionaux des Etats-Unis sont restées sans lendemain.
M. Kim a pris du recul sur la scène internationale depuis. Il n’a pas quitté son pays depuis un déplacement en Russie en septembre 2023. Ce sera seulement sa neuvième sortie de Corée du Nord depuis son accession au pouvoir, sans compter deux brefs passages dans la zone démilitarisée à la frontière avec la Corée du Sud.