La dignité
Dr. Sirwan Abdulkarim Ali / Analyste politique et chercheur - traduit par EDGEnews.

Les récentes tragédies survenues dans la région principalement druze de Suwayda, en Syrie, nous rappellent cruellement l'effondrement profond des valeurs humanitaires dans les régions en proie à des conflits armés. Alors que les détails de la mort du vieil homme restent partiellement non confirmés, la simple existence de vidéos le montrant soumis à l'humiliation et à une possible torture constitue en soi une grave violation des principes fondamentaux de la dignité humaine. Le fait de forcer un vieil homme à aboyer comme un chien, de lui raser la moustache (symbole de virilité dans de nombreuses cultures du Moyen-Orient) et les agressions physiques présumées reflètent l'effondrement des limites éthiques qui ont traditionnellement régi même la conduite de la guerre. Il ne s'agit pas seulement d'actes de cruauté individuelle ; il s'agit de rejets symboliques de codes d'honneur, de religion et de culture vieux de plusieurs siècles, qui imposaient autrefois des limites à la vengeance et à la violence.
Ce qui s'est passé hier à Suwayda n'est pas sans rappeler ce qui s'est passé à Bagdad en juillet 1958, lorsque la famille royale irakienne, dont le Premier ministre Nuri al-Said, a été sauvagement assassinée. Leurs corps ont été profanés et traînés dans les rues, non pas pour la justice, mais pour le spectacle. Ces actes ne sont pas de simples bouleversements politiques, ils sont les marqueurs d'une maladie sociale plus profonde. Les symptômes d'une telle maladie se manifestent lorsque la loi est remplacée par la loi du plus grand nombre et que la vengeance devient plus puissante que la pitié. Il ne s'agit pas seulement d'un problème syrien ou irakien, mais d'une tragédie moyen-orientale qui perdure depuis des générations. L'Iran a également connu sa part de violence, où le peuple souffre sans fin, souvent entre le marteau de la dictature et l'enclume de la milice. L'État de droit est absent et, avec lui, l'humanité s'efface.
Ces quelques mots simples n'ont pas pour but de porter des jugements politiques, mais de témoigner. Ce que nous voyons aujourd'hui dans certaines parties du Moyen-Orient est un retour à l'ère du pillage et de la spoliation, où des hommes armés décident des destins et détruisent des vies sans honte. Les souffrances des peuples syrien, irakien et iranien ne sont pas accidentelles, mais systématiques et anciennes. Si les informations sur la mort de cet homme âgé sont confirmées, on pourrait peut-être dire qu'il a été délivré par Dieu d'un monde qui l'a laissé tomber. Il avait de la dignité, non pas parce qu'il était riche ou puissant, mais parce qu'il était un être humain. Et cette dignité mérite d'être rappelée : il était cent fois l'homme que ses bourreaux ne seront jamais.