Dix mille ou sept mille pas par jour : quelle est la meilleure façon de marcher pour la santé ?

Selon une étude publiée dans « The Lancet Public Health », marcher 7 000 pas quotidiens pourrait être un objectif « plus réaliste et atteignable » pour réduire les risques de certaines maladies.

Juil 26, 2025 - 06:37
Dix mille ou sept mille pas par jour : quelle est la meilleure façon de marcher pour la santé ?
A Paris, le 7 février 2022. LUDOVIC MARIN / AFP

Aurait-on enfin déterminé le nombre idéal de pas quotidiens pour vivre mieux et plus longtemps ? Marcher 7 000 pas par jour – soit l’équivalent d’une heure – réduit de façon significative la mortalité et la survenue de maladies potentiellement graves comme les pathologies cardio-vasculaires, le diabète, ou encore les démences, conclut une équipe internationale de chercheurs, qui a passé au crible la littérature scientifique.

Pour la professeure Ding Ding (université de Sydney, en Australie), première autrice de ces travaux publiés mercredi 23 juillet dans The Lancet Public Health, et ses collègues, ce nombre de 7 000 pas quotidiens pourrait constituer « un objectif plus réaliste et atteignable » pour certains que les fameux 10 000 pas par jour. D’autant que cette barre symbolique bien connue du public ne repose pas tant sur des bases médicales établies que sur un concept marketing né au Japon dans les années 1960, au moment des Jeux olympiques de Tokyo (1964).

Selon les dernières données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), publiées en 2024, près d’un tiers (31 %) des adultes, soit 1,8 milliard de personnes, sont insuffisamment actifs, ce qui les expose à un risque accru de nombreux problèmes de santé.

Pour réduire le fardeau des maladies chroniques (dans lesquelles le manque d’activité physique pèserait pour environ 8 %), les recommandations internationales se réfèrent jusqu’ici à la quantité de temps passé dans des activités d’intensité plus ou moins importante. Ainsi, pour les adultes, l’OMS préconise 150 à 300 minutes par semaine d’activité physique modérée (marche, vélo ou natation « plaisir ») ou 75 à 150 minutes d’activité physique d’intensité soutenue (tennis, sports de combat ou collectifs…).

Outil de mesure simple

Le décompte des pas quotidiens, grâce à des podomètres, accéléromètres ou applications tracker d’activité physique, se développe beaucoup depuis une dizaine d’années, y compris en recherche. Il a l’avantage d’être un outil de mesure simple, et facilement compréhensible par le public, mais à l’époque des dernières directives sur l’activité physique (2020 pour l’OMS), les données étaient considérées comme insuffisantes pour intégrer ce paramètre dans les recommandations, expliquent les auteurs de l’article dans The Lancet Public Health.

Pour avoir un panorama complet et récent sur la question, ces chercheurs ont passé en revue les résultats de recherches publiés entre janvier 2014 et février 2025. Ils ont retenu les études prospectives qui avaient évalué l’association entre le nombre de pas quotidiens, mesuré de façon objective, et au moins un paramètre de santé (mortalité, incidence de diverses maladies) dans des populations d’adultes.

Au total, ils en ont sélectionné cinquante-sept, provenant de trente-cinq cohortes, menées dans une dizaine de pays, dont les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Japon. Selon le problème de santé étudié, l’effectif était variable, allant de 61 594 individus pour le diabète de type 2 à 161 176 pour la mortalité globale. « Pour la mortalité toutes causes confondues, l’incidence des maladies cardiovasculaires, la démence et les chutes, une association dose-réponse inverse et non linéaire a été observée, avec des points d’inflexion aux alentours de 5 000 à 7 000 pas par jour », constatent la professeure Ding Ding et ses collègues. Un pas représentant, selon les personnes, 50 à 80 centimètres, 7 000 pas correspondent à une distance parcourue de 3,5 km à 5,6 km, et 4,5 km pour un pas moyen de 65 cm.

« Mettre l’accent sur le progrès »

Comparées aux personnes faisant 2 000 pas par jour, celles marchant 7 000 pas quotidiens ont une baisse de 47 % de leur mortalité globale et par maladies cardio-vasculaires, et de 37 % pour celle liée aux cancers. De même, leur risque de survenue de plusieurs pathologies est statistiquement réduit : – 38 % pour les démences, – 25 % pour les affections cardio-vasculaires, – 22 % pour les dépressions, – 14 % pour le diabète et – 28 % s’agissant des chutes. La baisse d’incidence des cancers (6 %), évaluée à partir de seulement deux études, n’est en revanche pas statistiquement significative dans leurs analyses, pointent les auteurs.

Pour certaines pathologies, des pas supplémentaires augmentent les bénéfices. Par exemple, avec 10 000 pas quotidiens au lieu de 7 000, l’incidence des démences diminue encore de 7 points, et l’incidence du diabète de type 2 de 8 points. « Mais au-delà de 7 000 pas, les avantages supplémentaires pour la plupart des résultats de santé que nous avons examinés sont modestes », estime Katherine Owen, de l’école de santé publique de Sydney, coinvestigatrice principale de ce travail, dans un communiqué. La scientifique australienne précise toutefois que « pour les personnes déjà actives, 10 000 pas par jour est un bon objectif ».

Outre l’effet dose du nombre de pas, les chercheurs ont tenté d’explorer l’impact de la cadence de la marche sur le risque de maladies, mais leurs résultats sont trop limités pour en déduire des recommandations, jugent-ils. Prudents, ils listent par ailleurs les limites et potentielles faiblesses de leur travail : faible nombre d’études sauf pour la mortalité globale et les maladies cardio-vasculaires, hétérogénéité des cohortes… Ils rappellent par ailleurs que le décompte des pas quotidiens n’est guère adapté à des activités comme le cyclisme ou l’aviron, ni à certaines populations, celles avec une limitation de la mobilité notamment.

L’équipe collabore désormais avec le gouvernement australien pour utiliser ces résultats afin d’éclairer les futures mises à jour des directives en matière d’activité physique. En attendant de voir peut-être un jour ces 7 000 pas quotidiens devenir une recommandation officielle de santé publique, Ding Ding plaide pour le pragmatisme : « Notre recherche aide à mettre l’accent sur le progrès plus que sur la perfection. Même de petites augmentations de l’activité physique quotidienne peuvent conduire à des améliorations significatives de la santé », assure-t-elle. Comme le dit l’OMS, chaque pas compte.

[Source: Le Monde]