La Lituanie ferme sa frontière avec la Biélorussie
L’Etat balte dénonce la violation de son espace aérien, après l’arrivée de dizaines de ballons gonflés à l’hélium lancés depuis la Biélorussie, qui l’ont obligé à fermer l’aéroport de Vilnius à quatre reprises ces derniers jours.
Tentative de contrebande ou opération de déstabilisation ? Après l’envoi, depuis la Biélorussie voisine, de dizaines de ballons météorologiques transportant des cigarettes, qui ont perturbé le trafic aérien lituanien depuis une semaine, Vilnius a tranché, lundi 27 octobre : les deux derniers postes-frontières encore ouverts dans le sud du pays, à Salcininkai et Medininkai, fermés la veille, resteront clos jusqu’à nouvel ordre. « Cela envoie un signal clair à la Biélorussie : aucune attaque hybride ne sera tolérée ici, et nous prendrons les mesures les plus strictes possibles pour mettre fin à de telles actions », a commenté la première ministre, Inga Ruginiene, lors d’une conférence de presse.
Selon le Centre national de gestion des crises, les radars surveillant l’espace aérien lituanien ont détecté 66 objets volant de la Biélorussie vers la Lituanie, dans la nuit de dimanche à lundi. L’aéroport de Vilnius est resté fermé pendant sept heures, affectant 47 vols et plus de 7 000 passagers. Ses activités avaient déjà dû être suspendues à trois reprises les jours précédents, pour les mêmes raisons. Au total, 140 vols ont dû être annulés ou retardés.
Le 25 octobre, le ministère lituanien des affaires étrangères avait convoqué le chargé d’affaires biélorusse à Vilnius pour lui faire part de la « vive protestation » de l’Etat balte contre les incursions répétées dans son espace aérien. « Le ministère a souligné que les violations de la frontière constituent une violation flagrante du droit international (…). La Lituanie a également averti qu’elle considérait ces incidents comme une provocation délibérée et une escalade des tensions », précisait un communiqué.
Une réaction sans effet puisque, le soir même, de nouveaux ballons météorologiques survolaient la frontière. Utilisés par les passeurs pour transporter de la marchandise de contrebande, les premiers objets volants de ce type ont été observés en 2023. En août, puis début octobre, les gardes-frontières en ont repéré à nouveau plusieurs dizaines, forçant déjà les autorités lituaniennes à fermer l’aéroport de Vilnius. Jamais, cependant, il n’en était arrivé autant, aussi fréquemment.
Appel à des sanctions supplémentaires
« Il apparaît de plus en plus clairement qu’il ne s’agit pas d’un simple trafic. La contrebande sert de couverture à ce qui est en réalité une opération psychologique hybride », a constaté, lundi matin, Deividas Matulionis, conseiller principal à la sécurité nationale du président lituanien, Gitanas Nauseda, sur la chaîne de radio LRT. « Les autocrates testent une nouvelle fois la résilience de l’Union européenne et de l’OTAN face aux menaces hybrides », a renchéri la première ministre sur X.
En plus d’annoncer la fermeture de la frontière – qui ne concernera pas les diplomates ni les citoyens lituaniens et européens –, Mme Ruginiene a fait savoir que l’armée prendrait « toutes les mesures nécessaires, y compris cinétiques »pour abattre les ballons. Le gouvernement prévoit aussi de durcir les peines contre les personnes impliquées dans le trafic. Enfin, la Lituanie va informer ses alliés et compte proposer « un ensemble supplémentaire de sanctions contre la Biélorussie ».
M. Nauseda a également évoqué un sujet hautement sensible : la possibilité de restreindre le transit ferroviaire entre la Biélorussie et l’enclave russe de Kaliningrad, via le corridor de Suwalki, bande de terre de 65 km entre la Pologne au sud et la Lituanie au nord. En juin 2022, une mesure similaire avait provoqué la colère de Moscou. La Lituanie avait finalement levé les restrictions, un mois plus tard.
[Source: Le Monde]