Trump et Nétanyahou veulent parachever leur vision d’une paix au Moyen-Orient
De nombreux obstacles se dressent encore sur la voie d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et de l’adhésion de nouveaux pays aux accords de normalisation avec Israël.

Le président américain, Donald Trump, et le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, veulent capitaliser sur l’accord de cessez-le-feu scellé entre Israël et l’Iran, mardi 24 juin, ainsi que sur l’affaiblissement de la République islamique, pour parachever leur vision d’une paix au Moyen-Orient. Parallèlement à un accord sur le nucléaire iranien, les deux dirigeants cherchent à mettre un terme à vingt mois de guerre dans la bande de Gaza et à obtenir l’adhésion de nouveaux pays, notamment l’Arabie saoudite et la Syrie, à une normalisation de leurs relations avec l’Etat hébreu dans le cadre des accords d’Abraham.
Vendredi 27 juin, M. Trump a estimé qu’un cessez-le-feu entre le Hamas palestinien et Israël serait possible « dès la semaine prochaine ». Jeudi 26 juin, son émissaire spécial pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, avait assuré, sur la chaîne américaine CNBC, que les Etats-Unis pourraient annoncer « bientôt » l’adhésion de nouveaux pays aux accords d’Abraham. De nombreux obstacles se dressent pourtant encore sur ce chemin, que ce soit le fossé qui sépare les positions d’Israël et du Hamas sur un cessez-le-feu à Gaza, ou la réticence de l’Arabie saoudite à normaliser ses relations avec l’Etat hébreu sans reconnaissance par celui-ci d’un Etat palestinien.
« Après leur victoire en Iran, les Israéliens ne veulent pas retomber dans le cauchemar de Gaza. L’opération israélienne dure depuis plus de cent jours et ses objectifs – parmi lesquels en finir avec le Hamas et récupérer les otages – n’ont pas été atteints. Si les Israéliens continuent de s’enliser à Gaza, les gens oublieront la victoire sur l’Iran,estime Azmi Keshawi, expert à l’International Crisis Group (ICG). Donald Trump estime, lui, qu’il a remporté une grande victoire en Iran et qu’il ne pourra pas obtenir son prix Nobel de la paix s’il n’arrête pas la guerre à Gaza, à laquelle les Américains apportent leur soutien. »
Les médiateurs américain, égyptien et qatari ont intensifié les contacts avec les deux belligérants pour relancer les pourparlers sur le dossier gazaoui. Le Hamas comme l’Etat hébreu disent être prêts à reprendre les négociations, mais aucune session de pourparlers n’a encore été fixée au Caire ou à Doha. Le ministre des affaires stratégiques israélien, Ron Dermer, est attendu lundi 30 juin à la Maison Blanche pour des entretiens sur l’Iran et Gaza et pour préparer une visite de M. Nétanyahou à Washington durant l’été, a rapporté le média Axios, vendredi.
Un compromis reste à trouver entre Israël et le Hamas. Israël demeure attaché au plan Witkoff. Les pourparlers avaient achoppé, en mai, après que le Hamas eut envoyé une réponse à ce plan, jugée « inacceptable » par Washington. Le plan prévoit une trêve de soixante jours durant lesquels Israël doit effectuer un retrait partiel de l’enclave palestinienne, augmenter l’aide humanitaire et libérer des prisonniers palestiniens, en échange de la libération d’une partie des 49 otages enlevés le 7-Octobre, vivants et morts, encore détenus par le Hamas. Le reste des otages devra être libéré à l’issue de cette phase, qui débouchera sur un cessez-le-feu permanent.
La guerre à Gaza a durci la position saoudienne
Bien qu’affaibli par la décapitation de sa direction à Gaza et isolé par la perte de ses principaux soutiens, le Hezbollah libanais et l’Iran, le Hamas s’accroche à deux exigences. Il veut obtenir des Américains la garantie que la trêve débouchera sur un cessez-le-feu permanent et sur un retrait complet d’Israël de l’enclave. Le précédent cessez-le-feu s’était effondré, le 2 mars, face au refus de M. Nétanyahou de négocier le passage à la seconde phase de l’accord et avec la relance par Israël des hostilités à Gaza.
Le Hamas refuse, d’autre part, sa démilitarisation. « Déposer les armes serait un suicide pour le Hamas, pour la population de Gaza et pour la Palestine. Cela signifierait la fin de la résistance contre Israël, qui pourrait alors agir à sa guise dans la bande de Gaza », souligne Azmi Keshawi. Le mouvement palestinien est, en revanche, prêt à renoncer à gouverner Gaza, tant qu’il n’est pas exclu de la scène politique. Il pourrait aussi accepter une clause sur l’expulsion de ses chefs hors de Gaza, dès lors que sa direction a été décimée et qu’il ne reste plus que quelques figures majeures sur le terrain.
Un cessez-le-feu dans la bande de Gaza est une étape indispensable pour espérer faire avancer le dossier de la normalisation avec Israël. Dimanche 22 juin, M. Nétanyahou a vu dans l’affaiblissement de l’Iran et de son « axe de la résistance » une « victoire » qui « offre l’occasion d’élargir considérablement les accords de paix ». Après la signature des accords d’Abraham avec les Emirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc, en 2020, le sésame serait l’adhésion de l’Arabie saoudite, le leader du monde arabe et musulman sunnite.
La guerre à Gaza, qui a fait plus de 57 000 morts parmi la population gazaouie, a durci la position saoudienne. Riyad fait désormais de la reconnaissance d’un Etat palestinien par Israël un préalable. Or le gouvernement Nétanyahou s’y oppose fermement jusqu’à présent. « S’il n’y a pas de reconnaissance d’un Etat palestinien par Israël, les gouvernements et les peuples du Golfe seront contre la normalisation. Le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salman, veut qu’on se souvienne de lui comme celui grâce à qui a été établi l’Etat palestinien », estime Bader Al-Saif, expert au Arab Gulf States Institute, à Washington.
Face au refus saoudien, Washington cherche, au minimum, à obtenir l’adhésion de Damas. Depuis la chute du dictateur syrien Bachar Al-Assad, en décembre 2024, les nouvelles autorités emmenées par le président de transition, Ahmed Al-Charaa, ont engagé des pourparlers directs avec Israël pour résoudre le contentieux autour de l’occupation israélienne du plateau du Golan et celle, plus récente, d’une bande frontalière dans le Sud syrien. Des responsables syriens ont admis, sous le couvert de l’anonymat, ne pas exclure de parvenir à un accord de paix avec Israël d’ici à la fin du mandat de M. Trump.
[Source: Le Monde]